Soirée débat
avec Elie Geffray le jeudi 3 mars 2016.
Devant une
belle assemblée d’une centaine de personnes Elie Geffray est venu nous parler
de l’information et de la façon de se former une opinion sérieuse et réfléchie
sur les nombreux et complexes sujets de l’actualité.
1 1.- Abondance de l’offre en matière
d’information générale.
La presse
papier a été créée dans les années 1790, à la fin di 16e siécle par
Théophraste Renaudot, sous forme de Gazette. L’objectif était de faire
connaître au public de toutes les catégories sociales, y compris les plus
pauvres, « ce qui fait du bruit sur
les choses qui adviennent ». Sur ce thème le conférencier nous a donné les
chiffres des tirages actuels des grands
journaux papier et de leur diffusion nationale : tirage / Le parisien
aujourd’hui en France : 400 000 exemplaires; Le figaro 317 000, Le Monde
275 000, Les échos 123 000 ; Libération 101 000 ; La
Croix 94 000, le seul en
augmentation ; jusqu’à L’humanité
40000 ex. ; la plupart de ces journaux sont en perte de vitesse en version
papier.
Le choix
d’E. Geffray pour son information se porte sur un tiercé : La Croix, Le
Monde (en particulier Le Monde des livres, le vendredi) et Libération (par
« romantisme sartrien »). La lecture des grands quotidien nationaux
permet d’avoir une information large et contradictoire ; c’est exigeant et
couteux, mais il nous recommande de « fréquenter une fois par semaine un
quotidien national pour prendre de la hauteur ».
-La presse
régionale a un fort tirage, (760 000 exemplaires pour Ouest-France), elle
compte quelques bonnes plumes et permet aussi à travers le « Point de
vue » en fin de journal (OF) de connaître des opinions variées sur un
problème particulier (voir la chronique du 23/02 : « L’Islam
est-il compatible avec la république ?»). Il est intéressant de croiser la
presse régionale et nationale pour se constituer des petits dossiers sur tel ou
tel sujet.
-La presse
locale ou de proximité a toute sa place ; par exemple l’Hebdomadaire
d’Armor (indépendant) a une diffusion à cheval sur 3 départements, et cette
presse par les infos locales, développe le sentiment d’appartenance à un groupe,
à un territoire, à travers la vie des associations et des communes. Il est
souhaitable que cette place hiérarchise plus les informations : faut-il
donner la même place à une conférence de l’UTL ou à un tournoi de
belotte ? La presse locale permet une ouverture aux idées nouvelles, un
enrichissement et doit nous « tirer vers le haut ».
-Les radios
nous permettent également des nous informer, mais elles ne prennent pas
toujours le temps d’approfondir les sujets, ce qui est pourtant nécessaire.
-Les
télévisions nous informent essentiellement à travers les « journaux
télévisés » ; mais les objectifs ne sont pas tous les mêmes :
pour France2 : informer/ instruire/ distraire ; pour TF1 :
l’audience/ l’audience et encore l’audience. Il reste des débats de qualité,
par exemple « C’est dans l’air » sur la 5.
-Internet :
« un média qui est bien pratique mais qui pose beaucoup de
problèmes » (Alain Rémond) ; comment consulter internet en faisant
des choix et utiliser cet outil sans perdre le lien social ? Cette
technique de communication doit être régulée et soumise à la loi. Quant aux
réseaux sociaux, les échanges y sont le plus souvent d’une grande pauvreté.
2- Comment se repérer face à une
telle variété ?
Un
conseil : prendre du temps et se repérer dans un média de référence :
approfondir un sujet, croiser les opinions, ne pas hésiter à lire de temps en
temps la presse satirique, « c’est assez sain » ! Et en lisant
les grands hebdos, se méfier de la « people-isation » des sujets
traités et de l’appauvrissement qui en découle. L’important est de prendre
conscience de notre appartenance à une communauté : l’opinion publique.
3 3.- Ce qui pollue les médias.
Il faut se
reporter à l’ouvrage de Guy Debords dans les années 70, « La société du
spectacle », pour comprendre à quel point l’information devient une
marchandise, et se développe (parfois) à travers le culte de la vitesse, de
l’émotion et de l’info superficielle : il faut avant tout « faire le
buzz », au détriment du temps d’approfondissement. Certains jeunes
journalistes manquent cruellement de culture ; ils centrent leurs
interview sur l’attente d’une réponse déjà prévue, ou par exemple, sur un
schéma du « folklore provincial ». Le résultat est pauvre et
superficiel.
4 4.- La question de la nationalité.
A cause de la crise actuelle, on parle tous
les jours de nation et de nationalité, il faut tenter de comprendre de quoi on
parle. Elie Geffray fait alors référence
à Ernest Renan qui a donné sa conception de la nationalité en 1882 à la
Sorbonne : ce qui fait une nation ce n’est pas la race ; la notion de
« race blanche chrétienne » ne correspond à rien. La France a une
identité, faite du mélange des origines, et des religions, même si elle a des
racines chrétiennes. Il existe aussi une communauté d’intérêts économiques,
comme à travers la création de l’Europe, mais ce n’est pas seulement ça qui
fait une identité. La chose la plus importante, c’est le partage des valeurs communes, des valeurs liées à
des évènements du passé ; mais aussi à des éléments du présent. L’identité
se construit par le choix que chacun fait tous les jours de participer à cette
communauté de valeurs. Dans l’avenir, la nation sera dépassée par les « Etats-unis
d’Europe » ; cela va au-delà d’un simple marché économique.
Aujourd’hui, le politique n’assume pas en Europe cette connaissance de nos
valeurs.
Au cours du
débat est abordée la question des migrants : il faut se demander quels
sont leurs souhaits : une vie meilleure. Elie Geffray propose d’établir un
accueil avec un temps de probation, pour leur permettre de connaître et
d’intégrer nos valeurs. Il ne faut pas confondre « nationalisme » et
« patriotisme » ; le nationalisme est une attitude de fermeture,
et a toujours entraîné des guerres, tandis que le patriotisme correspond à une
attitude d’ouverture et de solidarité.
Une autre
question porte sur la qualité des chaînes d’info continue : c’est la
course à l’info superficielle, à la curiosité malsaine ; il n’y a pas
d’approfondissement sérieux ni de temps de recul nécessaire. Certains sondages
(Europe1) posent uniquement la question : « êtes-vous pour ou contre
tel sujet … » ; cela n’a aucun intérêt, car le ressenti n’est
pas un jugement construit.
Enfin est
posée la question de la place de l’argent dans les médias, avec pour exemple la
présence de V. Bolloré sur Canal plus et la perte d’l’esprit Canal. Pour Elie
Geffray, idéalement, l’information devrait être payée par nos impôts.
La soirée
s’est terminée par l’appel d’Elie Geffray à écouter la prochaine conférence
donnée par un de ses amis, Georges Lefeuvre, anthropologue et diplomate, sur la
question Afghane, et la naissance du terrorisme dans le territoire
Afghanistan-Pakistan. (jeudi 24 mars).
LAUR'ART
Association culturelle du Mené
22230 Laurenan
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